[Scroll #9] Vitrail 2.0, tendances musicales & Skyblog

Human to Human
7 min readAug 23, 2021

Mai 2021

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Il faut qu’on vous en parle

Une fois n’est pas coutume, commençons par une #MinuteHistoire. Après l’incendie de la cathédrale de Chartres en 1194, de nombreux donateurs ont contribué à la rénovation de l’édifice en finançant notamment 172 verrières qui sont aujourd’hui encore connues dans le monde entier pour leur teinte de bleu tout à fait unique. Outre les nobles et ecclésiastes, on retrouve parmi les généreux donateurs de nombreuses corporations : boulangers, fourreurs, cordonniers, vignerons ou drapiers, chaque métier y est allé de son don pour financer au total 45 verrières, se payant au passage une belle publicité qui traversera les siècles (en termes de ROI, on a rarement vu mieux)

Tag yourself I’m the horse

Faisons maintenant un bond de plus de 800 ans dans le futur, les choses ont-elles vraiment changé ? Plus que jamais, la profession que nous exerçons contribue à définir notre identité aux yeux des autres, quoi de plus naturel donc que de vouloir en parler, tout comme le faisait les corporations il y a plusieurs siècles. Et si les réseaux sociaux sont un terrain d’expression tout adressé pour l’époque, une plateforme en particulier semble s’inscrire dans la veine de Chartres : des images colorées qui captent le regard, une manière de raconter des histoires pour retenir l’attention de l’abonné (le fidèle d’aujourd’hui), une profusion de contenus … TikTok ne serait-il pas le vitrail du 21e siècle ?

Réseau social ou guide Onisep
Mais des gens qui racontent le quotidien de leur métier, on en croise déjà sur Twitter, nous direz-vous à juste titre. Pourtant TikTok se différencie par des aspects assez notables : tout d’abord, il s’agit d’une plateforme visuelle, avec de nombreux outils d’édition, qui favorisent davantage la mise en scène et la narration — c’est ce qui le rapproche de son ancêtre vitré. La réalité y est forcément un peu déformée, présentée dans un format qui sera susceptible de parler au plus grand nombre. En outre, le fait que ce ne soit pas un réseau social basé sur l’écrit facilite la prise en main auprès d’un public plus large.

De plus, contrairement à d’autres plateformes visuelles comme Instagram, qui aurait pu prétendre au titre, TikTok propose également un immense potentiel de viralisation : peu importe que vous ayez 5 ou 50000 abonnés, vous n’êtes pas à l’abri de « faire le buzz » avec une seule vidéo qui parviendrait à atterrir sur la « For You Page » de nombreux utilisateurs. De même, le choix d’un réseau 100% vidéo rend également les contenus plus vivants et plus attrayants, et encourage davantage la spontanéité.

Et cela se vérifie en pratique. Un petit tour sur TikTok (bon ok, plutôt 3 ou 4 heures) permet de constater que de nombreux métiers se mettent déjà en scène. Et la variété est saisissante : Facteurs et livreurs, vendeurs, mais aussi cadres de bureaux en overdose de télétravail, soignants, agriculteurs, hôtesses de l’air, ou encore des prêtres. La liste est longue et pourrait probablement remplir tout un guide Onisep.

Une opportunité de dépasser l’employee advocacy

Pour les créateurs, les motivations pour s’exprimer et se mettre ainsi en scène sont souvent les mêmes que sur les autres réseaux sociaux : par passion, par recherche d’audience, ou tout simplement pour évacuer les frustrations du quotidien. Il faut aussi souligner que l’on parle avant tout de son métier avant de parler de son entreprise, ce qui renforce l’idée d’un retour vers une logique de corporation.

Et si, on le redit, les prises de parole d’employés prédatent TikTok, force est de constater que l’explosion du réseau social (800 millions d’utilisateurs actifs dans le monde en 2020, à comparer aux 187 millions d’utilisateurs actifs de Twitter) a remis la question de l’expression des salariés au cœur débat. Si les marques ont d’abord vu TikTok d’un mauvais œil, ne souhaitant pas que les employés se filment sur leur lieu de travail, on remarque depuis quelques mois un changement d’attitude, probablement lié au succès et à l’influence de la plateforme dans la culture populaire.

D’une posture de méfiance envers le réseau social, certaines marques ont évolué vers une posture plus opportuniste, cherchant à s’en approprier les codes pour porter leur discours. Ainsi, on a vu fleurir les initiatives plus ou moins réussies : Dunkin’ Donuts a son « crew » d’ambassadeurs montrant les secrets de fabrications de ses boissons, tandis que McDonald’s et L’armée de l’Air n’hésitent pas à surfer sur les tendances TikTok et à mettre en scène leurs employés pour attirer de nouvelles recrues.

Toutefois, ces initiatives restent pour le moment isolées, et toutes reposent sur la volonté ainsi que la créativité des employés. De plus, les codes parfois déroutants de la plateforme demandent un niveau d’implication supérieur de la part des collaborateurs, et réduit donc considérablement le pool de d’employés éligibles à ce genre de démarche. Alors que les programmes d’employee advocacy « classiques » reposent souvent sur la présence des managers ou sur une sélection précise de profils, il faut accepter ici de privilégier ceux qui maîtrisent les codes.

Le succès de TikTok et la difficulté d’en tracker les contenus imposent aux marques qui souhaitent y être représentées de revoir leur définition de l’employee advocacy et d’accepter de nouvelles règles: se détacher des outils d’employee advocacy où le collaborateur n’est le plus souvent qu’un simple relais, ne pas avoir la totale maitrise des intervenants ou des messages, cultiver et célébrer l’unicité des employés-créateurs, et accepter de mettre sa réputation entre leurs mains.

Si ces conditions sont remplies, alors TikTok peut être un atout considérable pour compléter des démarches d’advocacy plus traditionnelles, qui restent pertinentes sur les autres réseaux, en faisant parler de l’entreprise « par ricochet », sans pour autant tomber dans la récupération maladroite.

On suit aussi…

> La bataille de l’audio se poursuit
Difficile de passer à côté du feuilleton de 2021. Et pour cause, depuis notre dernier Scroll, les choses ont encore évolué. On en était resté aux annonces de Reddit et Facebook ; depuis, Instagram s’est positionné sur le créneau et permet à ses utilisateurs de couper le micro et la vidéo lors des lives à plusieurs. De son côté, Twitter a officiellement lancé sa fonctionnalité Spaces, annoncée depuis plusieurs mois maintenant et désormais ouverte aux comptes ayant plus de 600 abonnés. De quoi faire peur à Clubhouse, dont les chiffres de téléchargements sont passés de 9,6 millions en février à 900 000 en avril.

> Le retour du payant, ce n’est pas pour tout de suite

Autre fonctionnalité notable lancée par Twitter (en attendant le Super Follow) ces dernières semaines : la possibilité de soutenir un profil en lui laissant un pourboire. Si l’apparition de cette option pour le moins surprenante laisse à penser que notre rapport aux contenus que nous consommons en ligne est en train de changer, une récente étude IAB Europe risque de calmer les plus optimistes, affirmant notamment que 75% des européens préfèrent conserver les publicités ciblées plutôt que de payer pour les services utilisés sur Internet.

> Industrie musicale x réseaux sociaux, un feat. qui dure

Il semble loin le temps où Internet et les réseaux sociaux étaient vues comme la grande menace pour l’industrie musicale. Celle-ci semble avoir réussi à s’adapter à un environnement changeant. On l’a vu l’an dernier avec la montée de TikTok, qui a propulsé certains artistes (et leurs maisons de disque) en tête des charts — à ce sujet, on vous conseille la lecture de cette enquête de Bloomberg révélant comment l’algorithme choisit et pousse aux influenceurs les chansons destinées à être les plus populaires sur la plateforme.
On le vérifie encore ce mois-ci, avec l’annonce d’un partenariat entre Twitter et Billboard, référence des classements musicales, pour créer un nouveau “top” qui indiquera quotidiennement les chansons les plus tweetées.

> Des nouvelles de Skyblog (vous avez bien lu)
Alors que TikTok, Clubhouse et Instagram semblent dominer notre quotidien, certains internautes résistent encore et toujours à l’envahisseur. C’est le cas de Robert, qui tient depuis 2008 un Skyblog sur Tourcoing, comme le raconte Numerama. Vestige d’un temps qui semble lointain, où le web 2.0 n’en était encore qu’à ses débuts, Skyblog continue de séduire certains internautes pour sa simplicité d’usage et son calme. Ces derniers craignent tout de même que le site vienne à fermer prochainement. Une peur fondée, si l’on en croit le sort qu’ont connu 14 millions d’utilisateurs MySpace il y a quelques années, lorsque toute la musique uploadée sur la plateforme avant 2016 a été « accidentellement » supprimée suite à une migration de serveur.
Et pour aller plus loin, on vous recommande la série en 4 épisodes de Programme B dédiée au succès fulgurant de Skyblog.

> TikTok s’allie au média activiste ATTN

Un partenariat plutôt inédit : pendant un an, le média activiste ATTN aura les clés du compte @TikTokforGood (46,8k abonnés) pour y diffuser ses contenus et soutenir des associations. Un bon moyen pour TikTok de renforcer les liens avec son cœur de cible, la GenZ, très sensible aux problématiques sociales et environnementales.

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